Source : Bear et al. 2002, Figure 11.6
Article modifié le 3 décembre 2025 à 17h35
Les sons que nous entendons au quotidien font vibrer une membrane extrêmement fine située à l’entrée de l’oreille moyenne : le tympan. Ces vibrations sont transmises à une seconde membrane (la fenêtre ovale qui transmet les ondes à l’oreille interne) via une chaîne de trois petits os – le marteau, l’enclume et l’étrier qui servent d’amplificateur.
L’otospongiose est un trouble du métabolisme osseux au niveau de l’oreille moyenne, l’os normal par endroit étant remplacé par un os de mauvaise qualité. Ces foyers otospongieux peuvent siéger dans n’importe quelle partie de l’oreille, mais avec une prédilection pour certaines régions comme la région de l’étrier (dernier osselet), entrainant son blocage progressif. Résultat : comme l’os ne vibre plus correctement, la personne entend moins bien.
Cette maladie est progressive et entraîne souvent une surdité de transmission, c’est à dire une perte auditive liée à un problème mécanique dans l’oreille moyenne, les ¾ du temps dans les 2 oreilles. La moyenne d’âge de découverte se situe autour de la trentaine, avec une prédominance féminine chez les caucasiens (peau claire), et une possible origine héréditaire.
L’otospongiose est responsable d’une surdité évolutive, entraînant progressivement une gêne sociale de plus en plus invalidante. De diagnostic simple, elle doit être reconnue précocement, car elle peut bénéficier d’un traitement chirurgical dont les résultats sont le plus souvent spectaculaires et ainsi éviter à ce qu’elle ne se propage pas jusqu’à l’oreille interne, où le risque serait une surdité de perception touchant la cochlée.
Astuce : Si vous ne voulez pas lire tout l’article, rendez-vous directement au point n°9 : En bref.
Vue d’ensemble
- Quels sont les signes ? (symptômes)
- D’où vient-elle ? (causes)
- Quand dois-je consulter ?
- Comment la confirme-t-on ? (diagnostic)
- Est-ce qu’il faut la traiter ? (traitement)
- Est-ce grave ?
- Quoi faire en prévention ?
- Quel est le suivi après traitement ?
- En bref.
- Quels sont les signes ?
Certaines personnes peuvent être atteintes d’otospongiose sans jamais s’en rendre compte, car la maladie n’avance pas suffisamment pour que les signes et les symptômes s’établissent. Elle est d’ailleurs plus fréquence que l’otospongiose avec symptômes.
- En cas de symptôme, le principal est une baisse progressive de l’audition dans une seule oreille ou dans les deux. Cette surdité peut s’aggraver parfois plus rapidement, notamment chez la femme, en particulier à l’occasion d’une grossesse (libération d’hormones importante). Contrairement à la perte auditive due au bruit, qui affecte d’abord la capacité à entendre les sons de haute fréquence, l’otospongiose déclenche régulièrement des troubles avec des sons graves, profonds. Dans certains cas, les personnes atteintes d’otospongiose parlent doucement car elles considèrent leur propre voix comme forte. La personne peut avoir la sensation d’oreille bouchée.
D’autres signes peuvent apparaître :
- Acouphènes : bruits dans l’oreille ou la tête (bourdonnements, sifflements), permanents ou intermittents, de timbre varié avec parfois l’impression d’entendre son cœur battre.
- Beaucoup plus rarement, vertiges légers.
2. D’où vient-elle ?
De nombreux spécialistes pensent que l’otospongiose pourrait être déclenchée par une combinaison d’aspects héréditaires, écologiques, hormonaux et autres. En effet, les causes exactes de l’otospongiose sont encore mal connues : le consensus actuel précise cependant qu’il s’agirait probablement d’une maladie génétique (bien que le gène responsable n’ait pas encore été identifié) avec une transmission autosomique dominante – cela signifie que, si un parent sur les deux est porteur du gène responsable de l’otospongiose, l’enfant aura un risque d’environ 50 % d’être également porteur de ce gène. Ainsi, les experts estiment que la moitié des cas d’otospongiose sont des formes dites ” familiales “. Dans le cas où une otospongiose d’origine génétique serait diagnostiquée, il est recommandé d’effectuer, à titre préventif, des examens au sein de la famille.

L’otospongiose touche un peu plus fréquemment les femmes que les hommes1,2,4. L’explication relèverait d’hormones féminines qui seraient un facteur de risque dans le développement de la maladie : d’après cette étude5, la grossesse semblerait avoir un effet aggravant sur l’évolution de l’otospongiose. Tout traitement hormonal (contraception, hormonothérapie substitutive), chez une femme atteinte d’otospongiose, mériterait une concertation entre son gynécologue et son oto-rhino-laryngologiste (ORL).
3. Quand dois-je consulter ?
Si vous constatez une baisse de votre audition, que vous ressentez des acouphènes (sifflement ou bourdonnement d’oreille) ou encore si vous avez des vertiges. Ces symptômes doivent vous alerter. Nous vous conseillons de consulter un oto-rhino-laryngologiste (un professionnel de l’oreille, du nez et aussi de la gorge, ou ORL) ou d’en parler à votre médecin de famille qui vous orientera vers un ORL.
Pour limiter la perte auditive et traiter efficacement la maladie, le diagnostic de l’otospongiose doit être précoce.
4. Comment la confirme t-on ?
Le médecin ORL réalise :
- Un examen clinique avec observation d’un tympan normal, des questions sur de la santé clinique de la personne et du bien-être des membres de sa famille. Cette recherche d’antécédents familiaux d’otospongiose est un argument important du diagnostic.
- Les réactions au diapason pour retrouver une surdité de transmission, une audiométrie pour vérifier s’il s’agit d’une surdité de transmission ou mixte et d’apprécier l’importance de la baisse auditive et de juger des possibilités chirurgicales. Une encoche de Carhart localisée en général sur le 2000 Hz peut laisser supposer une otospongiose.
- Une tympanométrie avec réflexe stapédien qui peut être absent (puisque l’étrier est bloqué)
- Un scanner des os de l’oreille (dit « scanner des rochers »), dans certains cas, pour confirmer la présence de l’otospongiose où l’os apparaît moins dense que l’os normal et correspondant aux foyers otospongieux.
- Parfois, une video-nystagmographie (VNG) peut être demandée pour étudier une atteinte vestibulaire peu visible, qui semble présente dans 25 à 30% des cas selon cette étude2, en particulier dans le cas de surdité mixte.

5. Est-ce qu’il faut la traiter ? (traitement)
Actuellement, il n’existe pas de traitement médicamenteux pour l’otospongiose universellement reconnu.
Comme la baisse d’audition peut évoluer, il va devenir nécessaire de traiter l’otospongiose à un moment donné. Le seul cas où il sera urgent de s’en occuper, c’est si la maladie gagne l’oreille interne. Dans tous les cas, l’ORL vous dira quoi faire. S’il s’agit d’une évolution lente, il pourra même conseiller d’attendre et d’observer régulièrement l’audition.
En ce qui concerne le traitement, il faut savoir que l’otospongiose ne se soigne pas spontanément. Cependant plusieurs solutions existent pour améliorer l’audition :
La Chirurgie
- Dans le cas le plus fréquent où l’otospongiose atteint l’étrier, le traitement est essentiellement chirurgical. Une des opérations standards consiste à retirer l’étrier touché et le remplacer par une prothèse, un étrier synthétique, conçu pour restaurer la continuité de la transmission sonore. C’est la stapédectomie qui est réalisée sous anesthésie générale.
- Une autre diffère légèrement en ce sens qu’elle consiste à créer un petit trou dans l’os de l’étrier et à insérer une minuscule prothèse pour contourner l’os anormal. On appelle cette technique la stapédotomie.
- Un examen radiologique pré-opératoire devrait être effectué notamment pour exclure des pathologies se rapprochant de l’otospongiose
- La récupération de l’audition est alors progressive (plus rapide par stapédectomie). Les vertiges et les acouphènes s’atténuent. Les résultats sont dans la grande majorité des cas excellents.
- Évidemment, comme toute opération, il existe un risque faible d’échec ou de surdité de perception post-opératoire. Les principes de l’intervention, bénéfices attendus et risques opératoires pourront être exposés au patient par le chirurgien ORL.
- En raison des changements de pression, vous devriez renoncer aux voyages en avion et à la plongée pendant la période de 6 semaines suivant l’opération.
Les Appareils Auditifs
- Il représente une alternative à la chirurgie lorsque celle-ci est contre-indiquée (sujet âgé, atteinte importante de l’oreille interne, surdité totale et non améliorable de l’autre oreille…) ou refusée par le patient.
- Chez certains patients présentant une atteinte mixte (blocage de l’étrier + altération de l’oreille interne), l’appareillage auditif peut également être proposé en complément de l’intervention chirurgicale.
Les aides auditives ne constituent pas une solution curative, mais ils améliorent l’audition et par-là même votre qualité de vie.
6. Est-ce grave ?
Même si cette maladie peut être gênante, elle évolue lentement la plupart du temps. La première partie de l’aggravation se passe sur le facteur transmissionnel de la surdité, accessible au traitement chirurgical. Par contre, cela peut évoluer vers une altération neuro-sensorielle irréversible.
Dans les rare cas d’otospongiose avancée, lorsque la chirurgie et l’aide auditive n’apportent plus assez, il pourrait être envisagé une implantation cochléaire. Pour la suisse romande, il s’agit du service du Professeur Pascal Senn au Centre Universitaire Romand d’Implants Cochléaires (CURIC) au HUG de Genève (Tél : 022 372 82 71 – implants.cochleaires@hcuge.ch) Il faudra attendre leur diagnostic pour savoir si une implantation est souhaitable.
Il existe aujourd’hui des traitements efficaces, donc avec un bon suivi médical et une prise en charge au bon moment, on peut dire que la plupart des personnes touchées peuvent continuer à mener une vie normale, avec une bonne audition.
7. Quoi faire en prévention ?
L’otospongiose est une maladie qui ne peut pas être évitée. Le seul cas où il serait possible de faire de la prévention, c’est lorsque vous savez qu’au sein de votre famille il existe des gens touchés par l’otospongiose. Dans un tel cas, vous pourriez demander un test génétique préventif afin de savoir si vous devez vous faire suivre pour cette pathologie. En effet, même si les gènes et variants spécifiques responsables restent inconnus, 9 emplacements de gêne3 ont été identifiés et associés aux formes monogéniques de l’otospongiose.

8. Quel est le suivi après un traitement ?
En cas d’opération, il faudra retirer les pansements au niveau de l’oreille dans les jours qui suivent et jusqu’à plusieurs semaines. Les professionnels vous renseigneront sur le moment adéquat. Un test auditif post opération pourra aussi être réalisé afin de vérifier le fonctionnement de l’oreille interne, ainsi que la récupération.
Il est normal que votre oreille coule un peu et que vous entendiez un peu moins bien. Vous recevrez des conseils pour les choses qui ne sont pas recommandées et leur durée (ex : shampoing liquide, ne rien mettre dans l’oreille, limitation des activités sportives, risque avec l’avion, etc.)
Vous devrez vous présenter aux urgences dans les cas suivants : vertiges (ils peuvent persister un mois ou plus), sifflement important, paralysie faciale, écoulement de l’oreille, et contacter le chirurgien au moindre doute.
9. En bref
L’otospongiose est une maladie bénigne de l’oreille moyenne affectant la transmission des sons et se développant lentement. La personne va ressentir une baisse progressive de l’audition, souvent avec des acouphènes. Si des cas ont déjà été dépistés dans votre famille, il est conseillé de se faire dépister.
Un traitement précoce est à privilégier, et selon les cas, les actions possibles sont la chirurgie ou l’appareillage auditif.
Avertissement : Ce résumé est informatif et à visée éducative. Il ne remplace pas un avis médical. En cas de doute, consultez un professionnel de santé.
- Résultats audiométriques du traitement chirurgical de l’otospongiose. H. Khaled et Al. (2014)
- Vestibular assessment in patients with otosclerosis. Shaima M. Mohsen Ali et Al. (2025)
- Exploring the genetic landscape of otosclerosis: current understanding and future perspectives. Silvia Capoblanco et Al. (2025)
- The Relationship of Gender with The Incident of Otosclerosis Based on Ear Location at The Medismart Clinic, Mataram City. Sabila Izzatina Azmy Mujahid et Al. (2024)
- Does Pregnancy Have an Influence on Otosclerosis ? Cristoforo Fabbris et Al. (2021)


Leave a Reply